Document de travail des consultations nationales
Comment mettre fin à la traite des personnes

I. Préface

Le présent document de travail a été préparé par Sécurité publique Canada en consultation avec le Groupe de travail fédéral sur la traite de personnes. Son objectif est de susciter des discussions et des commentaires qui guideront le gouvernement du Canada dans l'élaboration d'une nouvelle stratégie nationale visant à mettre fin à la traite de personnes. Il vise également à aider à s'assurer que la nouvelle stratégie nationale est fondée sur des données probantes et appuie la prévention des crimes et la protection des victimes. La structure et le contenu du présent document – particulièrement les éventuels domaines ciblés – ont pour but d'orienter le discours plutôt que de refléter les éléments finaux d'une stratégie nationale, lesquels prendront en compte les commentaires reçus à propos du présent document et dans le cadre d'autres activités de mobilisation. Le document de travail prend en compte particulièrement les résultats de l'évaluation et des rapports de 2012 à 2016 du Plan d'action national de lutte contre la traite des personnes et les leçons retenues par le Gouvernement du Canada dans le cadre de la mise en œuvre du Plan d'action, y compris les commentaires recueillis de plusieurs tables rondes nationales. Un certain nombre de problèmes et questions clés sont pris en compte afin de faciliter les contributions des intervenants participant aux consultations.

II. Introduction

Qu'est-ce que la traite des personnes?

Le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants définit la traite des personnes comme étant « […] le recrutement, le transport, le transfert, l'hébergement ou l'accueil de personnes, par la menace de recours ou le recours à la force ou à d'autres formes de contrainte, par enlèvement, fraude, tromperie, abus d'autorité ou d'une situation de vulnérabilité, ou par l'offre ou l'acceptation de paiements ou d'avantages pour obtenir le consentement d'une personne ayant autorité sur une autre aux fins d'exploitation. L'exploitation comprend, au minimum, l'exploitation de la prostitution d'autrui ou d'autres formes d'exploitation sexuelle, le travail ou les services forcés, l'esclavage ou les pratiques analogues à l'esclavage, la servitude ou le prélèvement d'organes. »

Aussi appelée trafic de personnes, la traite des personnes est un crime complexe qui est facilité par plusieurs facteurs, y compris la vulnérabilité de certaines personnes face à l'exploitation et la demande pour certains biens et services. Pour les trafiquants, il s'agit d'une entreprise très profitable et à faible risque, qui semble être l'un des crimes les plus en croissance à l'échelle mondiale, selon l'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC). La traite des personnes peut avoir lieu tant à l'échelle nationale qu'à l'échelle internationale (y compris en franchissant une frontière internationale).

Les trafiquants utilisent diverses méthodes afin de maintenir un contrôle sur leurs victimes, y compris la force, l'agression sexuelle, les menaces de violence, l'abus de pouvoir et en attaquant les points faibles des personnes. Les victimes subissent des abus physiques, sexuels, financiers et émotionnels, et vivent et travaillent souvent dans des conditions horribles. Étant donné le mal et la violence infligés aux victimes, la traite des personnes est associée à un traumatisme important et le rétablissement à la suite des impacts sur les victimes peut durer toute une vie.

Terminologie

Le présent document de travail emploie les termes « victime » et « survivant » de manière interchangeable afin de faire référence aux personnes traitées. La « victime » est définie dans la Charte canadienne des droits des victimes comme étant une personne qui a subi des dommages matériels, corporels ou moraux ou des pertes économiques par suite de la perpétration d'un crime. Le « survivant » est un terme employé par certaines personnes qui ont vécu une expérience et par certains fournisseurs de services afin de reconnaître la difficulté de reprendre le contrôle de leur vie.

Contexte global

Traite des personnes ou esclavage moderne?

Certains pays préfèrent utiliser l'expression « esclavage moderne » pour englober l'ensemble des infractions liées à la traite d'êtres humains, à la servitude et au travail forcé. Cependant, l'expression « esclavage moderne » ne dispose pas d'une définition juridique internationalement reconnue. Le terme « esclavage » possède sa propre définition dans la Convention relative à l'esclavage.

Le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants (Protocole relatif à la traite des personnes) a été le premier instrument juridique international portant sur la traite de personnes. Le Protocole relatif à la traite des personnes énonce le cadre international le plus accepté globalement afin de lutter contre la traite des personnes et identifie un cadre pour les mesures clés à prendre en vue de répondre à ce crime, connu en tant que modèle à quatre piliers (4-Ps): la prévention du crime, la protection des victimes, la poursuite des trafiquants en justice et la collaboration en partenariats. Le Canada a ratifié le Protocole relatif à la traite des personnes le 13 mai 2002.

Le nombre de victimes de la traite des personnes à l'échelle mondiale varie de  24 millions (Organisation internationale du Travail) à 40 millions (Global Slavery Index). Selon l'ONUDC, la majorité des victimes de traite connues – environ 70 % – sont des femmes et des filles, dont un tiers sont des enfants.

En 2016, la Global Slavery Index a évalué les réponses à l'esclavage moderne dans 161 pays et a rapporté que : 124 avaient criminalisé la traite de personnes, conformément au Protocole relatif à la traite des personnes; 96 avaient des plans d'action nationaux pour la  coordination de  la réponse du gouvernement; et 150 gouvernements fournissaient une quelconque forme de service aux victimes et survivants de traite de personnes.

La traite des personnes au Canada

Les Lois canadiennes interdisent la traite des personnes à toute fin d'exploitation, que la traite ait lieu seulement au Canada ou qu'elle concerne l'entrée de personnes au Canada.

L'article 279.01 du Code criminel (2005) interdit la traite des personnes :
Quiconque recrute, transporte, transfère, reçoit, détient, cache ou héberge une personne, ou exerce un contrôle, une direction ou une influence sur les mouvements d'une personne, en vue de l'exploiter ou de faciliter son exploitation commet une infraction passible, sur déclaration de culpabilité par voie de mise en accusation [...]

Selon l'article 118 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés (LIPR) :
Commet une infraction quiconque sciemment organise l'entrée au Canada d'une ou plusieurs personnes par fraude, tromperie, enlèvement ou menace ou usage de la force ou de toute autre forme de coercition.

Conformément à la définition internationalement reconnue de « traite », l'infraction criminalise des actes spécifiques menés à des fins d'exploitation.

Portée de la traite des personnes au Canada

Il est difficile d'évaluer la portée de la traite des personnes au Canada en raison de sa nature clandestine, et de la réticence des victimes et des témoins à se présenter à la police, ainsi que des défis liés à l'identification des victimes. Selon les rapports des fournisseurs de services et d'organismes de première ligne abordant directement les victimes, la plupart des cas ne sont jamais déclarés à la police en raison de menaces des trafiquants, de la peur, de l'embarras, de barrières linguistiques et de la méfiance vis-à-vis des autorités.

Au Canada, les données sur la traite des personnes sont recueillies de diverses façons, y compris dans le cadre d'incidents rapportés à la police, de condamnations et de la délivrance de permis de résident temporaires (PRT) pour les présumées victimes de traite. Bien qu'il soit difficile de déterminer la portée de la traite des personnes au Canada, les statistiques suivantes fournissent un certain contexte :

Les statistiques identifiées par le CNCTP découlent de cas spécifiques de traite des personnes à travers le  Canada, identifiés dans le cadre de la recherche du CNCTP. Il est difficile d'obtenir des données consolidées, fiables et opportunes sur les accusations et les condamnations de traite des personnes, car rapporter ces cas au CNCTP n'est pas une exigence obligatoire pour les organismes d'application de la loi au Canada. Pour cette raison, les statistiques du CNCTP ne fournissent pas une représentation complète des cas de traite des personnes à travers le  Canada.

Le projet PROTECT met également en lumière la portée de la traite des personnes au Canada. Lancé au début de 2016, ce partenariat entre les banques canadiennes, le Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada (CANAFE) et la police soutient l'identification et la déclaration aux autorités des transactions financières soupçonnées d'être liées au blanchiment d'argent associé à la traite des personnes à des fins d'exploitation sexuelle.

Le nombre de rapports de transactions suspectes par des institutions financières au CANAFE relativement au projet PROTECT a augmenté de manière considérable chaque année et a mené à la divulgation de plus de renseignements financiers par CANAFE à des organismes d'application de la loi à l'échelle nationale et internationale. Ces renseignements financiers aident la police dans ses enquêtes sur le blanchiment d'argent et la traite des personnes.

Nombre de divulgations de renseignements financiers par le CANAFE à des organismes d'application de la loi

2015-2016

26

2016-2017

120

2017-2018

143

*Les périodes de rapports sont fondées sur l'exercice financier (1er avril au 21 mars)

Les victimes et les survivants

Les populations les plus à risque de la traite sont celles qui sont exposées à un certain nombre de facteurs de risque se chevauchant et celles qui font partie de groupes défavorisés ou marginalisés. Les enfants, les adolescentes et les femmes tendent à être  les plus à risque de traite et d'exploitation à des fins sexuelles, tandis que les hommes et les femmes sont à risque d'exploitation à de fins de travail.

Les femmes et les filles des Premières Nations, inuites et métisses, les jeunes à charge, les fugueurs, les jeunes sans-abri, les personnes handicapées, les réfugiés et les immigrants, et les personnes LGBTQB sont particulièrement vulnérables. N'importe qui, peu importe son niveau de revenu, peut être victime de traite; le facteur commun reste une certaine forme de vulnérabilité.

Exemples de scénarios de traite

Les femmes et les filles autochtones

Le rapport provisoire de l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées (l'Enquête nationale) a fait plusieurs recommandations et sert de modèle pour l'avancement de l'Enquête nationale. Dans le rapport, les commissaires identifient la traite à des fins sexuelles comme un problème émergent : « […] que le trafic sexuel est bien réel dans les communautés autochtones et les centres urbains. Ils ont ajouté que les femmes, les filles et les personnes LGBTQB autochtones sont surreprésentées dans l'industrie du sexe et qu'il y a encore des préjugés associés au travail du sexe, ce qui provoque des conflits au sein des familles et entre les organisations quant aux meilleures façons de protéger les travailleuses du sexe. Ils ont par ailleurs mentionné le lien entre la prostitution et l'exploitation des ressources naturelles, puisque la culture et les valeurs associées aux camps industriels à prédominance masculine peuvent accroître la vulnérabilité des femmes et des filles à la violence . »

Une fois adoptées, les recommandations de l'Enquête nationale pourront contribuer au travail visant à mettre fin à la traite des femmes et des filles autochtones. D'autres rapports examinés dans le cadre de l'Enquête nationale ont souligné ce qui suit :

Les trafiquants

Les trafiquants peuvent être des hommes et des femmes, des partenaires intimes, des personnes inconnues des victimes, des organisations criminelles, des propriétaires d'entreprises, des collègues, des membres de la famille, des diplomates, des propriétaires de fermes, des opérateurs d'usines, des grandes ou petites entreprises ou des gangs.

La traite des personnes à des fins d'exploitation sexuelle à l'échelle nationale n'est pas nécessairement associée à des trafiquants qui pourraient avoir des liens avec des gangs de rue ou le crime organisé. Les victimes sont souvent recrutées par des personnes qu'elles considèrent être leur partenaire romantique.

Les cas de traite des personnes à des fins de travail forcé au Canada ont impliqué des hommes et des femmes venant de Chine, d'Éthiopie, de Hongrie, de Roumanie, d'Inde, du Mexique, des Philippines, de Pologne et de Thaïlande. En 2012, un réseau familial hongrois (17 personnes) a  été condamné au Canada pour traite de Hongrois à des fins de travail forcé dans l'industrie de la construction.

III. Mettre fin à la traite des personnes

Mesures visant à prévenir la traite des personnes à l'échelle nationale

Prévention
Protection
Poursuite
Partenariats

En juin 2012, le gouvernement du Canada a lancé le Plan d'action national de lutte contre la traite des personnes (Plan d'action national), qui est fondé sur le Protocole relatif à la traite des personnes et les réponses fédérales existantes visant à lutter contre la traite des personnes.

Le Plan d'action national inclut des initiatives à l'échelle nationale et internationale, et vise à lutter contre le travail forcé (par exemple, l'élaboration de produits de sensibilisation pour les travailleurs temporaires étrangers, les employeurs et les tiers) et l'exploitation sexuelle (par exemple, le financement d'initiatives visant à mettre fin à la violence contre les femmes et les filles). Il vise également le soutien aux victimes (par exemple, le financement de projet grâce au Fonds d'aide aux victimes de Justice Canada).

La traite des personnes est un phénomène complexe associé à plusieurs facteurs différents, y compris, notamment, la migration, l'exclusion économique, les droits de la personne, le travail et la violence fondée sur le sexe. Pour cette raison, le Groupe de travail fédéral sur la traite des personnes (GTTP) réunit des agents de divers ministères et organismes fédéraux et couvre un vaste éventail d'enjeux, y compris, par exemple, des questions internationales, des questions liées aux Autochtones, à l'application de la loi, à l'immigration et des sujets relatifs à l'approvisionnement, afin d'identifier les réponses stratégiques interdisciplinaires et intersectorielles en matière de lutte contre la traite.

Membres du GTTP

Le Groupe de travail sur la traite des personnes (GTTP)

Dirigé par Sécurité publique Canada et comprenant les représentants des ministères et organismes fédéraux clés, le GTTP fournit un point central pour les efforts de lutte contre la traite des personnes du gouvernement fédéral.

Le GTTP collabore avec les intervenants provinciaux et territoriaux afin de soutenir l'échange d'information et la collaboration, et ce, en reconnaissant qu'une mobilisation et une coordination régulières sont essentielles. En tout temps, de nombreuses opérations et initiatives fédérales, provinciales et territoriales de lutte contre la traite des personnes sont mises en œuvre partout  Canada. Étant donné que les gouvernements de l'Ontario, du Manitoba et de la Colombie-Britannique ont chacun leur propre stratégie visant à lutter contre la traite des personnes, il est nécessaire de s'assurer que l'orientation et les priorités établies dans le cadre des stratégies sont complémentaires, et non contraires au travail entrepris, et qu'elles tirent profit des leçons retenues et de la communication de celles-ci.

Depuis 2013, le GTTP tient des conférences fédérales, provinciales et territoriales chaque trimestre sur la traite des personnes afin de soutenir l'échange d'information et les efforts de coordination. Le cadre de coopération et de collaboration des ministères et organismes fédéraux qui a mis sur pied le GTTP, ainsi que les efforts des provinces et des territoires, des services de police et des intervenants à travers le  Canada, et leur coordination, fournit la structure en vertu de laquelle les initiatives fédérales en matière de lutte contre la traite des personnes sont mises en œuvre.

L'évaluation du plan d'action national

L'évaluation du Plan d'action national s'est achevée en octobre 2017 et souligne les conclusions suivantes :

L'évaluation souligne également plusieurs problèmes et lacunes clés comme : une focalisation accrue sur la traite à des fins de travail, un mécanisme centralisé de collecte de données, un mécanisme national d'orientation et un plus grand soutien aux victimes et aux personnes vulnérables.

Recommandations de l'évaluation horizontale du Plan d'action national pour 2016-2017

Les lacunes

Dans son évaluation des efforts du Canada pour éliminer la traite des personnes, le Rapport sur la traite des personnes aux États-Unis  de 2016-2017 a conclu que :

« Les ONG ont remarqué une inégalité continue dans les efforts de lutte contre la traite du gouvernement, qui portent une plus grande attention à la traite à des fins sexuelles et démontrent une plus grande compréhension de celle-ci, comparativement au travail forcé. »

« Les ONG et d'autres experts non gouvernementaux ont indiqué que la compréhension qu'ont la police et les procureurs de la traite des personnes varie, menant certains agents à qualifier les affaires de traite d'autre crime ou à porter des accusations au civil plutôt qu'au pénal. »

« Les experts ont rapporté que certains refuges pour victimes de violence domestique n'acceptent pas les victimes de traite en raison de la complexité de leurs besoins et par peur des trafiquants. »

Source : Rapport sur la traite des personnes aux États-Unis (2017)

La traite à des fins de travail

Le travail forcé est utilisé dans la production de biens qui se retrouvent dans les résidences canadiennes. Les chaînes d'approvisionnement globales complexes créent des vulnérabilités pour ceux dont la situation de travail au Canada et dans le monde est précaire. En 2017, Vision mondiale Canada a publié un rapport de recherche qui montre que plus de 1 200 sociétés opérant au Canada importent des biens qui peuvent avoir été produits par un enfant ou peuvent être le fruit de travail forcé, y compris des produits alimentaires et des vêtements . Le rapport a également conclu que les sociétés opérant au Canada divulguent très peu d'information sur les mesures prises afin de s'assurer que les chaînes d'approvisionnement sont exemptes d'exploitation.

Au Canada, les travailleurs migrants peu qualifiés et à faible revenu sont particulièrement à risque d'exploitation et d'abus en raison de plusieurs facteurs comme les barrières linguistiques, un travail dans des régions éloignées ou isolées, le manque d'accès  au soutien et le manque d'accès à l'information sur leurs droits. De plus, les travailleurs migrants qui ont des permis de travail liés à un seul employeur peuvent également souffrir en raison de leur statut précaire.

Les consultations de 2012 à 2016

Les conclusions de l'évaluation horizontale du Plan d'action national et les recommandations faites par le Rapport sur la traite des personnes aux États-Unis soutiennent les conclusions des consultations annuelles avec les intervenants de Sécurité publique Canada réalisées de 2012 à 2016, lesquelles ont conclu que :

Depuis l'achèvement de l'évaluation du Plan d'action national, le gouvernement du Canada a annoncé en février 2018 un financement de 14,51 millions de dollars sur cinq ans et de 2,89 millions de dollars par année par la suite afin d'établir une ligne d'urgence nationale en matière de traite des personnes.

Pourquoi des consultations sont-elles nécessaires?

Une réponse nationale viable et détaillée de lutte contre la traite des personnes nécessite une approche multidisciplinaire impliquant tous les niveaux du gouvernement et le public, ainsi que les intervenants. De plus,  des structures de coordination et de discussion appropriées afin de faciliter la surveillance continue de la mise en œuvre de la stratégie et l'examen de la réponse nationale de lutte contre la traite sont essentielles.

Un processus de consultation orientera une nouvelle stratégie nationale de lutte contre la traite des personnes. La participation des acteurs gouvernementaux et non gouvernementaux est essentielle afin d'adopter une approche interdisciplinaire et intersectorielle, des procédures normalisées, des définitions et une coopération. Il permet également de fonder la conception et la mise en œuvre de la réponse nationale de lutte contre la traite sur les opinions du public. Il s'agit d'un moyen de promouvoir la compréhension, une sensibilisation accrue et la viabilité des mesures.

Qui contribuera à la stratégie?

Objectifs

Résultat(s) anticipés (s)

IV. Sujets de discussion

Cadre pour une nouvelle stratégie nationale

Une nouvelle stratégie nationale doit avoir un cadre d'action clair et être guidée par des principes clés. Les éventuels principes pour une nouvelle stratégie nationale pourraient inclure :

La protection des victimes – s'assurer que la stratégie montre la compassion pour l'expérience des victimes, tant à l'échelle nationale qu'à l'échelle internationale; s'assurer que la stratégie soutient la police et que les mesures de justice pénale sont conformes aux obligations internationales du Canada (par exemple, le Protocole relatif à la traite des personnes).

Coopération – conclure et renforcer les partenariats avec tous les ordres de gouvernement, les organismes publics, le secteur privé et au-delà des frontières internationales.

Être fondée sur les faits – s'assurer une collecte de données et les méthodologies d'analyse adéquates sont mises en place.

Viabilité – maximiser les ressources existantes, assurer un financement adéquat des ressources et maintenir des initiatives à long terme.

Responsabilisation – s'assurer que les rôles et les responsabilités associés au financement, à la mise en œuvre et à l'évaluation de la stratégie sont clairement identifiés.

Approche intégrée – élaborer une approche intégrée incluant des politiques et des programmes sociaux et économiques, par exemple en matière d'éducation, de santé et de réduction de la pauvreté.

Sensible au sexe et à la diversité – utiliser le sexe et la diversité comme façon d'identifier les différents besoins des personnes vulnérables.

Être fondée sur les droits de la personne – situer la stratégie relativement aux droits de la personne.

Adaptabilité – capacité à s'adapter à de nouveaux problèmes et à des menaces émergentes.

Sensible à la technologie – s'assurer que l'utilisation et la mauvaise utilisation de la technologie sont prises en compte dans toutes les dimensions de la stratégie.

Les intervenants sont encouragés à offrir des idées relatives aux réponses stratégiques à la demande d'exploitation et à l'origine de la traite des personnes, ainsi qu'à la façon dont une nouvelle stratégie nationale pourrait refléter et prioriser ces problèmes.

Questions de discussion

Que devraient être le but et les objectifs de la stratégie nationale et quelle devraient être ses priorités ?

Devrait-on continuer à utiliser un modèle à quatre piliers?

Quels principes devraient être considérés lors de l'élaboration d'une nouvelle stratégie ?

Quels aspects de problèmes systémiques relatifs à la traite des personnes, par exemple le racisme, la pauvreté, l'oppression et l'inégalité entre les sexes, devraient être abordés dans une nouvelle stratégie nationale ? Comment ?

Comment la stratégie devrait-elle être surveillée et évaluée ? Comment ses progrès devraient-ils être rapportés ?

Collaboration accrue

Les participants aux consultations sont invités à identifier les façons dont la collaboration pourrait être améliorée. La nouvelle stratégie nationale doit tenir compte de la prestation des services, identifier les possibilités de financement, combler les lacunes du service et améliorer la coordination à l'échelle nationale. La stratégie doit également tenir compte des perspectives des Premières Nations, des Inuits et des Métis sur la façon d'améliorer la collaboration.

Questions de discussion

Existe-t-il des politiques ou des initiatives particulières fondées sur les données probantes relatives à la traite ou à l'exploitation dans votre région (ville, province ou territoire – par exemple, une stratégie ou une loi provinciale, un groupe de travail régional et des campagnes de sensibilisation destinées au public) ?

Quels organismes publics et privés fournissent des services aux personnes à risque de traite et d'exploitation, ou aux victimes (par exemple, des services juridiques, du soutien et un refuge, des services de santé et des services pour les jeunes à risque) ?

Quels types de ressources sont offerts aux fournisseurs de service (par exemple, des ressources financières, techniques et humaines) ?

De quelle façon la coordination et la collaboration pourraient-elles être améliorées chez les partenaires (au gouvernement fédéral, avec les provinces et les territoires, avec les peuples autochtones et avec les intervenants non gouvernementaux) ? Quels outils fonctionnent le mieux pour favoriser cette coordination et cette collaboration ?

Existe-t-il des protocoles locaux, provinciaux ou territoriaux entre la police, les municipalités et les services sociaux, et le secteur commercial, les ONG, les sites de travail industriel, les usines, etc. dans votre région ? Comment pourraient-ils être maximisés ?

Existe-t-il des programmes ou des initiatives qui ne fonctionnent pas desquels on pourrait apprendre ?

Protection des victimes

La nouvelle stratégie nationale devrait viser à combler les lacunes de la protection des personnes vulnérables, comme : les personnes LGBTQB, les jeunes à risque, les femmes et les filles autochtones et non autochtones, les réfugiés et les immigrants, et les personnes handicapées, ainsi que les liens entre la traite des personnes et la violence fondée sur le sexe.

Une stratégie nationale devrait inclure des commentaires de fournisseurs de services de première ligne et de survivants sur la possibilité d'un mécanisme national d'orientation, les besoins des victimes de traite à court, moyen et long terme, le fait de combler les lacunes du service, la prestation de services adaptés à la culture et guidés par le traumatisme, les approches fondées sur les droits de la personne, la participation des survivants dans les réponses de lutte contre la traite des personnes, des pratiques prometteuses relatives aux modèles d'hébergement et les approches fondées sur le traumatisme.

Questions de discussion

Comment pourrions-nous augmenter l'identification des victimes ? Quels sont les meilleurs outils pour une identification proactive ?

Connaissez-vous des interventions réussies effectuées auprès des groupes à risque, par exemple des enfants à charge ou qui ne le sont plus, des enfants sans-abri, des gangs de jeunes et des femmes défavorisées (consommation de drogues, consommation d'alcool et sans-abri) ?

Quels sont les barrières et les défis auxquels font face les personnes vulnérables afin d'accéder aux services nécessaires après avoir été victime de traite ?

Comment les victimes de traite des personnes sont-elles identifiées, protégées et soutenues durant leur rétablissement ?

Où et comment les victimes de traite peuvent-elles recevoir de l'aide dans leur région ?

Quels sont les besoins les plus immédiats des victimes de traite ? Qui peut le mieux répondre à leurs besoins ?

Quels sont les défis auxquels font face les organismes dans le cadre de la prestation de services aux victimes de traite ? Quels services de soutien et ressources sont nécessaires ?

Existe-t-il des programmes ou des initiatives qui ne fonctionnent pas desquels on pourrait apprendre ?

Comment pouvons-nous améliorer la cohérence et la conformité des services dans les provinces et les territoires ?

Collecte de données

La traite des personnes est un crime secret et clandestin, systématiquement sous-déclaré à la police, ce qui rend les statistiques fiables difficiles à obtenir. De plus, les renseignements disponibles au Canada sont dispersés dans différents ministères et organismes fédéraux et différentes juridictions, ainsi que d'autres organismes, y compris la police, les ONG et les chercheurs.

Obtenir des données consolidées, fiables et opportunes sur les accusations et les condamnations pour traite des personnes représente un défi au Canada. Statistique Canada recueille des statistiques annuelles sur les crimes déclarés à la police dans le cadre de son Programme de déclaration uniforme de la criminalité. Cependant, il ne conserve pas de renseignements sur les poursuites abandonnées ou en cours. La GRC (CNCTP) recueille des données sur les affaires spécifiques de traite des personnes à travers le Canada. Cependant, la déclaration de ces affaires au CNCTP n'est pas une exigence obligatoire pour les organismes d'application de la loi au Canada. Par conséquent, les statistiques du CNCTP ne sont pas une représentation complète des affaires de traite des personnes au Canada.

Questions de discussion

Comment pouvons-nous améliorer la collecte de données ?

Quelles sources de données pourraient aider à établir une représentation plus complète de la traite des personnes au Canada ?

Comment pouvons-nous améliorer les outils actuels de collecte de données afin de nous assurer que les populations marginalisées sont incluses dans les mécanismes de collecte de données ?

Traite à des fins de travail

Les affaires de traite à des fins de travail sont très difficiles à identifier et lorsqu'elles sont soupçonnées d'avoir lieu, elles peuvent être traitées comme des problèmes contractuels qui sont tranchés selon des normes de travail. Le cycle de dépendance des affaires de traite à des fins de travail est beaucoup moins compris que les affaires de traite à des fins sexuelles. Dans certains cas impliquant des personnes d'autres nationalités, les victimes de traite à des fins de travail souffrent de barrières linguistiques, travaillent ou vivent de manière isolée et craignent d'être expulsées s'ils déclarent être victimes de traite à des fins de travail.

Une nouvelle stratégie nationale devrait intégrer les commentaires des experts, de la police, des chercheurs, des travailleurs temporaires étrangers, des représentants de l'industrie, des réfugiés, des travailleurs immigrés, de nouveaux immigrants et d'autres sur les vulnérabilités des travailleurs, les industries à risque, les liens entre les politiques d'immigration temporaire et la traite à des fins de travail, la transparence de la chaîne d'approvisionnement, la sensibilisation des consommateurs et les défis associés à l'identification des affaires de traite à des fins de travail et à la protection des victimes.

Questions de discussion

Comment les victimes de traite à des fins de travail sont-elles identifiées, protégées et soutenues durant leur rétablissement ?

Les milieux de travail à plus grand risque de traite sont-ils suffisamment inspectés pour assurer des conditions de travail adéquates ?

Quelles industries peuvent utiliser ou permettre l'exploitation au travail ?

Qui sont les principaux acteurs du secteur privé qui pourraient favoriser l'identification des victimes ?

Quels services ou programmes visent la demande de l'exploitation associée au travail ? Que pourrait faire le secteur privé pour aider à réduire la demande ?

Quels sont certains défis et barrières de la lutte contre la traite des personnes dans la chaîne d'approvisionnement ?

Est-ce que les sociétés locales surveillent leur chaîne d'approvisionnement ?

Quels sont les liens entre l'économie canadienne, les dynamiques du travail à l'échelle internationale et la traite des personnes à des fins d'exploitation associée au travail ?

Application de la loi et poursuites

L'application de la loi est encouragée afin de continuer à partager de meilleures pratiques relativement aux enquêtes sur la traite des personnes et aux initiatives de lutte contre la traite des personnes. Cela devrait inclure une formation qui fournit aux agents les moyens de déterminer les indicateurs de traite des personnes afin d'identifier d'éventuelles victimes.

Les participants aux consultations sont invités à discuter des approches fondées sur les droits, des réussites et des échecs des réponses policières, des interventions visant des trafiquants, la demande de l'exploitation associée au travail, des mesures législatives, des méthodes innovatrices de recueillir des éléments de preuve à des fins de poursuite, d'améliorations de l'accès à la justice et de meilleures pratiques pour établir un lien de confiance entre les services de police et les communautés.

Questions de discussion

Quelles sont les tendances ou vos préoccupations relatives à la traite des personnes ?

Quels sont les aspects connus de la méthode de « recrutement des victimes » ? De quelle façon ces méthodes varient-elles d'une population à une autre ?

Comment les victimes de traite des personnes sont-elles identifiées ? Qu'est-ce qui empêche ces personnes d'être identifiées comme des « victimes de traite » ?

Est-ce que la police de votre région a suivi une formation sur la façon d'identifier et de traiter les affaires de traite de personnes ?

Quelles sont les tendances en matière de traite des personnes relatives aux autres activités criminelles (c'est-à-dire la vente ou la consommation de drogues) ?

Quelles sont les principales raisons d'échec de poursuites en matière de traite des personnes ?

Pourquoi les éventuelles enquêtes ne découlent-elles pas sur un procès (par exemple, le manque de coopération de la part des victimes, l'inexpérience des procureurs et/ou des juges des affaires de traite des personnes) ?

Quels sont les types de patrouilles ciblées, de surveillance de secteurs à haute criminalité et d'opérations spéciales qui existent actuellement ? De quelle façon pourraient-ils être maximisés ?

Quelles sont les barrières aux accusations et à la condamnation des personnes ayant commis des infractions relatives à la traite à des fins de travail ?

Solutions technologiques et de l'industrie

La nouvelle stratégie intégrera les connaissances de l'industrie, des experts, des chercheurs, des fournisseurs de services de première ligne et des survivants sur la façon de tirer profit de la technologie, des communications mobiles et des médias sociaux dans le cadre des efforts de lutte contre la traite des personnes et la façon de répondre à ses aspects financiers, d'adopter les bonnes pratiques relativement au partenariat avec le secteur privé afin de lutter contre la traite des personnes et d'aborder les différents outils qui facilite la traite, par exemple les sites de publicités en ligne, Bitcoin et les médias sociaux.

Questions de discussion

Quels sont les renseignements généraux existants sur le leurre en ligne ?

De quelle façon peut-on améliorer la compréhension du recrutement en ligne ?

Quelles méthodes disponibles peuvent être utilisées pour identifier un leurre ?

Le public est-il au fait des risques associés à l'envoi de messages texte de nature sexuelle et au leurre d'enfants à des fins d'exploitation sexuelle ?

De quelle façon l'industrie du voyage et de l'hôtellerie peut-elle prendre des mesures pour accroître la sensibilisation ?

Existe-t-il des campagnes de sensibilisation dans votre région ?

Existe-t-il des services visant à aider les parents, les enseignants et les jeunes à accroître la sensibilisation sur le leurre en ligne, à en apprendre sur la prévention et à renforcer leur capacité ?

De quelle façon les sociétés de technologie peuvent-elles aider à lutter contre la traite des personnes ?

V. Prochaines étapes

Sécurité publique Canada consulte les Canadiens dans le cadre d'une consultation ciblée en ligne, de tables rondes régionales et d'un sommet national qui servira à promouvoir une discussion ouverte entre la police, le gouvernement fédéral, les provinces et les territoires, les groupes autochtones, le secteur privé, l'industrie et les intervenants du public concernés par les efforts de lutte contre la traite des personnes au Canada. Les discussions avec les partenaires internationaux  serviront également à recueillir de l'information.

L'information recueillie durant le processus de consultation informera le gouvernement du Canada dans l'identification des priorités, des principales lacunes, des principaux défis, des liens d'interdépendance entre le gouvernement fédéral, les provinces et les territoires, de meilleures pratiques internationales et des priorités de la réponse fédérale à la traite de personnes.

Notes en bas de page

  1. 1

    La Global Slavery Index utilise le terme « esclavage moderne » comme terme englobant les diverses formes de coercition interdites par les instruments internationaux relatifs aux droits de la personne et aux normes de travail (par exemple, l'esclavage, les institutions et les pratiques similaires à l'esclavage, le travail forcé, la traite des personnes et le mariage forcé).

  2. 2

    Lesbienne, gai, bisexuel, transgenre, queer, bispirituel.

  3. 3

    Rapport provisoire, l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées : « Nos femmes et nos filles sont sacrées » (2017), p. 31.

  4. 4

    Ibid.

  5. 5

    Strategic Actions for the Prevention of Human Trafficking of Inuit Girls and Women in Canada : Human Trafficking Workshop Summary, 2014

  6. 6

    Commission d'enquête sur les femmes portées disparues, « Forsaken – The Report of the Missing Women Commission of Inquiry », 2012.

  7. 7

    Canada's Child & Forced Labour Problem, Vision mondiale Canada (2017)

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