Instruction du ministre à l’intention de l’Agence des services frontaliers du Canada : Les mineurs dans le système de détention liée à l’immigration du Canada

Le 6 novembre 2017

Préambule

  1. L’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) est responsable de l’administration et de la mise en application de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (LIPR), y compris de l’arrestation et de la détention des résidents permanents ou des étrangers au Canada.
  2. Le programme de détention liée à l’immigration du Canada se fonde sur le principe que la détention ne sera utilisée qu’en dernier recours, dans des circonstances bien définies et uniquement après que des solutions de rechange à la détention (SRD) appropriées auront été envisagées et qu’il aura été déterminé qu’elles ne conviennent pas ou qu’elles sont inaccessibles.
  3. Lorsqu’ils exercent leur pouvoir d’arrestation et de mise en détention en vertu de la LIPR et du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés (RIPR), les agents de l’ASFC sont guidés par la jurisprudence, les politiques internes, les lignes directrices et la Charte canadienne des droits et libertés.
  4. Les obligations internationales et les cadres législatifs et stratégiques nationaux du Canada comprennent les suivants :  
    1. La Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant (CDE), à laquelle le Canada est partie. Elle stipule que l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale dans toutes les mesures prises par l’État concernant des enfants;
    2. L’article 55 de la LIPR contient les dispositions concernant l’arrestation et la détention pour les adultes et les mineurs;
    3. L’article 60 de la LIPR affirme le principe selon lequel la détention d’un mineur doit être une mesure de dernier recours qui prend en compte d’autres motifs et critères applicables, dont l’intérêt supérieur de l’enfant;
    4. L’article 248 du RIPR prévoit d’autres facteurs aux fins de considération avant qu’une décision soit prise au sujet d’une détention ou d’une libération;
    5. L’article 249 du RIPR énonce les considérations particulières pour la détention des mineurs;
    6. Le manuel ENF 20 – Détention, les normes de détention nationales et le Bulletin opérationnel (OPS-2017-03 [Reporting of all Situations Involving the Detention or Housing of a Minor to the Border Operation Centre]);
    7. La Charte canadienne des droits et libertés (art. 7, 9, 10 et 15).
  5. Le Cadre national en matière de détention liée à l’immigration de 2016 a lancé le programme de transformation pour créer un système amélioré et plus équitable de détention liée à l’immigration pour améliorer l’infrastructure, fournir de meilleurs services de soins de santé mentale et physique aux centres de surveillance de l’immigration de l’ASFC, accroître les partenariats et les SRD, et réduire le nombre de mineurs en détention.

Objet

  1. La présente instruction ministérielle fournit au président de l’ASFC (conformément au paragraphe 5[1] de la Loi sur le ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile et aux paragraphes 6[1] et 8[1] de la Loi sur l’Agence des services frontaliers du Canada) la voie à suivre en ce qui concerne la façon dont l’Agence doit traiter les mineurs en détention liée à l’immigration.
  2. La présente instruction ministérielle sera utilisée en conjonction avec la Directive nationale sur la détention ou l’hébergement de mineurs (2017). 
  3. La présente instruction ministérielle ne change pas les autorités judiciaires existantes.

Principes

  1. La Directive nationale sur la détention ou l’hébergement de mineurs respecte les principes (a-d) et les objectifs (e-i) suivants :
    1. Les lois relatives au programme de l’ASFC, la LIPR, le RIPR, la Loi sur la protection des renseignements personnels, la Charte canadienne des droits et libertés et les obligations internationales du Canada concernant les droits des mineurs doivent être respectés;
    2. Le bien‑être des enfants, l’unité de la famille et l’utilisation de SRD seront les principes fondamentaux de l’orientation politique, conformément aux attentes et aux valeurs des Canadiens;      
    3. L’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale à évaluer par rapport à d’autres facteurs primordiaux et obligatoires de la législation;
    4. La sécurité publique et la sécurité nationale ne doivent pas être compromises en faveur du respect des objectifs stratégiques de la Directive nationale sur la détention ou l’hébergement de mineurs;  
    5. Arrêter la détention ou l’hébergement des mineurs et la séparation des familles, sauf dans des situations extrêmement rares;
    6. Chercher activement et continuellement des SRD lorsqu’une libération inconditionnelle est inappropriée aux fins mentionnées ci-dessus; 
    7. Préserver l’unité familiale;
    8. Faire en sorte que la période de détention ou d’hébergement d’un mineur, ou de séparation d’un mineur de ses parents ou tuteurs détenus, soit la plus brève possible; 
    9. Ne jamais isoler les mineurs ou les placer en isolement.

Définitions

  1. Mineur : est défini en vertu de la LIPR et de la CDE comme une personne de moins de 18 ans. Dans certaines provinces, un jeune âgé de 16 et 17 ans n’est pas considéré comme un mineur; il n’en demeure pas moins qu’il est considéré comme un mineur dans le contexte fédéral (R249).
  2. Détenu : un adulte ou un mineur assujetti à un ordre de garde en vertu de l’article 55 de la LIPR.
  3. Hébergé (mineur) : un étranger, un résident permanent ou un citoyen canadien qui, après la réalisation d’une évaluation de l’intérêt supérieur de l’enfant, est gardé avec ses parents ou tuteurs détenus à un centre de surveillance de l’immigration à la demande de ces derniers. Un mineur hébergé ne fait pas l’objet d’un ordre de garde et est libre de rester et de retourner au centre de surveillance de l’immigration sous réserve du consentement des parents ou des tuteurs et du respect des règles et des procédures de cette installation.  
  4. Intérêt supérieur de l’enfant : un principe international visant à s’assurer que les enfants profitent véritablement de l’intégralité des avantages de tous leurs droits reconnus dans le droit canadien et la CDE. C’est également une règle de procédure qui comprend une évaluation de l’incidence possible (positive ou négative) d’une décision sur l’enfant ou les enfants concernés.  
  5. Solution de rechange à la détention (SRD) : une politique ou une pratique assurant que les gens ne sont pas détenus pour des raisons liées à leur statut d’immigration. Les SRD permettent aux personnes de vivre dans des milieux communautaires, sans incarcération, pendant que leur statut d’immigration se règle. Les SRD comprennent les programmes communautaires (présentation en personne, dépôt en espèces ou cautionnement d’exécution, et gestion des cas et supervision dans la collectivité) en plus des outils de surveillance électronique, tels que la communication vocale pour se rapporter.

Responsabilisation et transparence

  1. La présente instruction ministérielle sert à renforcer la responsabilité ministérielle de l’ASFC quant à l’administration et à l’application des lois relatives à ses programmes.
  2. Au cours de la mise en œuvre de la présente instruction ministérielle, l’ASFC devra m’informer immédiatement s’il y a une possibilité qu’une de ses activités puisse avoir des effets nuisibles importants, tel qu’un risque pour la vie humaine; l’exposition à un risque pour l’ASFC, Sécurité publique Canada ou le gouvernement du Canada; ou une incidence négative touchant les relations bilatérales avec les organisations internationales ou nationales.
  3. Je m’attends également à ce qu’on m’informe si une activité opérationnelle soulève une importante question de politique publique ou contrevient à la présente instruction ministérielle. De plus, l’ASFC devra me présenter des rapports sur la détention ou l’hébergement des mineurs, et continuer de publier des statistiques à l’usage du public tous les trimestres.   
  4. Enfin, la présente instruction restera valide jusqu’à ce que soit apporté un changement important à une décision du cabinet, à une loi ou à une orientation stratégique qui minerait son applicabilité.
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