Résumé de recherche sur le crime organisé no 26 - Les valeurs mobilières et le crime organisé

Résumé de recherche sur le crime organisé no 26 - Les valeurs mobilières et le crime organisé Version PDF (47 Ko)

Il y a peu de preuves concernant la présence des organisations criminelles traditionnelles dans les marchés des valeurs mobilières, mais l'industrie est vulnérable aux activités frauduleuses menées par des initiés du marché.

Le présent rapport repose sur un examen d'articles universitaires, des entrevues avec des représentants des forces de l'ordre et des organismes de réglementation des valeurs mobilières de même que sur la législation et la réglementation régissant les marchés des valeurs mobilières au Canada. Bien que l'on sache que les groupes traditionnels du crime organisé ont été actifs dans les marchés de valeurs mobilières dans d'autres pays, il y a peu de données probantes quant à une telle infiltration au Canada. Il convient de noter qu'aucune poursuite liée à des violations de la réglementation des valeurs mobilières ne s'est servi des dispositions du Code criminel du Canada portant sur les organisations criminelles.

La nature complexe du secteur des valeurs mobilières au Canada est en grande partie attribuable à la répartition des pouvoirs entre les gouvernements fédéral et provinciaux. Le gouvernement fédéral est responsable des lois traitant des actes criminels liés au marché des valeurs mobilières au Canada, de même que des questions touchant aux risques systémiques et aux répercussions possibles d'importance régionale et nationale. Les provinces sont responsables quant à elles de l'administration des systèmes de justice civile et pénale, de la réglementation des droits de propriété et des droits civils, y compris les règlements et les infractions quasi criminelles dans le domaine des marchés des valeurs mobilières dans leur territoire respectif. Selon les auteurs, cette situation a mené à une approche fragmentée dans la manière dont on surveille actuellement les valeurs mobilières au Canada, et elle pourrait rendre le secteur vulnérable au crime organisé.

Malgré l'évolution progressive vers une plus grande surveillance et intégration à l'échelle nationale, le rôle traditionnel des provinces en matière de surveillance des marchés de valeurs mobilières dans leur territoire a été confirmé dans une décision rendue par la Cour suprême du Canada en 2011, décision dans laquelle on a rejeté les mesures visant l'établissement d'un organisme national de réglementation des valeurs mobilières. En fait, il y a des approches nationales intégrées en matière de surveillance, mais elles ne sont pas nécessairement contrôlées ou harmonisées de façon centralisée.

Le secteur des valeurs mobilières au Canada joue un rôle essentiel dans les services financiers, l'industrie et l'économie du pays en permettant aux gouvernements et aux entreprise : 1) de réunir des capitaux et d'obtenir des capitaux d'emprunt; 2) d'attirer les investissements étrangers; et 3) de permettre aux investisseurs de faire des transactions dans les marchés de capitaux nationaux et internationaux. En 2010, la capitalisation totale du marché s'est chiffrée à 2,3 billions de dollars canadiens, soit 4 pour cent de l'ensemble des échanges commerciaux sur les marchés de capitaux mondiaux. Par conséquent, même si un faible pourcentage de la richesse est détourné, cela peut se traduire en des sommes très élevées en valeur absolue.

Le rapport traite des manœuvres frauduleuses les plus courantes dans les marchés de valeurs mobilières au Canada, à savoir les placements frauduleux à haut rendement, les opérations pyramidales et les combines à la Ponzi, les placements illicites à l'étranger, et les activités de télémarking sous pression. Les auteurs ont souligné qu'il y avait des différences entre les types de manœuvres utilisées dans les provinces. Par exemple, en Ontario, il n'est pas rare de voir des opérations de vente sous pression impliquant des sociétés fictives ou des prises de contrôle inversées et l'usurpation d'images de marque, de même que des combines à la Ponzi, y compris l'utilisation des systèmes d'échange de monnaies étrangères. Au Québec, l'accent semble davantage mis sur la manipulation des marchés, une activité qui nécessite un accès aux fonds de placements enregistrés, les transferts de fonds et l'inflation artificielle des comptes et des placements connexes. Les groupes dont il était le plus question étaient des groupes complexes du crime organisé qui étaient déjà présents dans d'autres marchés illicites, comme les bandes de motards criminalisés et le crime organisé traditionnel de souche italienne.

Les auteurs ont relevé un certain nombre de facteurs pouvant contribuer à la vulnérabilité du secteur aux activités du crime organisé, notamment : l'utilisation peu fréquente des poursuites et des sanctions au criminel à l'égard des activités illicites, l'asymétrie d'information entre les investisseurs et les initiés des marchés, le coût élevé des enquêtes et des poursuites liées aux infractions dans le marché de valeurs mobilières, et le fait que les entreprises ne signalent pas toujours les méfaits en vue de conserver la confiance des investisseurs.

Les auteurs arrivent à la conclusion que la complexité du marché des valeurs mobilières au Canada présente certains défis pour ce qui est de l'élaboration de contre-mesures efficaces. Bien que tous les intervenants du marché ont intérêt à se protéger du risque, et le public à de protéger de la victimisation, cela doit toutefois être concilié avec le besoin d'assurer la croissance économique et la prospérité.

Le rapport recommande de sensibiliser le public à la criminalité en col blanc, tandis que les organismes de réglementation des valeurs mobilières, les représentants de la justice pénale et les médias devraient mettre davantage l'accent sur la dénonciation publique et la stigmatisation des délinquants et promouvoir une culture axée sur les comportements licites et éthiques. Les auteurs préconisent aussi un « modèle de renseignement intégré » où les organismes de contrôle fonctionneraient de manière interdépendante plutôt qu'indépendante dans le cadre d'un ensemble clairement défini d'objectifs et d'une stratégie coordonnée pour déceler et prévenir les violations, et ainsi réduire les répercussions et les préjudices par l'imposition de sanctions proportionnées.

Hicks, D., J. Kiedrowski, T. Gabor, M. Levi et R. Melchers (2011). A Study of the Vulnerability of the Canadian Securities Sector to Organized Crime. Ottawa (Ontario), Sécurité publique Canada.

Pour obtenir de plus amples renseignements sur la recherche en matière de crime organisé au sein de Sécurité publique Canada, veuillez communiquer avec l'Unité de recherche sur le crime organisé à l'adresse ocr.rco@ps-sp.gc.ca.

Les résumés de recherche sur le crime organisé sontrédigés pour Sécurité publique Canada et le Comité national de coordination sur le crime organisé (CNC). Le CNC et ses comités régionaux et provinciaux de coordination travaillent à différents niveaux en misant sur un but commun : établir des liens entre les organismes d'application de la loi et les décideurs du secteur public afin de lutter contre le crime organisé. Les résumés de recherche sur le crime organisé appuient les objectifs de recherche du CNC en faisant ressortir des renseignements fondés sur la recherche qui sont pertinents pour l'élaboration de politiques ou d'opérations. Les opinions exprimées dans le présent résumé sont celles des auteurs et ne reflètent pas nécessairement les opinions de Sécurité publique Canada ou du Comité national de coordination sur le crime organisé.

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