Observations préliminaires sur l’exploitation des unités d’intervention structurée de Service correctionnel du Canada
Les unités d’intervention structurée et le Comité consultatif sur la mise en œuvreNote de bas de page1 (26 octobre 2021)

Observations préliminaires sur l’exploitation des unités d’intervention structurée de Service correctionnel du Canada Version PDF (335 Mo)

Le régime des unités d’intervention structurée (UIS) a été établi par la loi en 2019 pour tenter de répondre aux contestations judiciaires réussies de l’ancien régime « d’isolement préventif ». L’intention était que les transferts aux UIS soient rares et qu’ils soient utilisés « que s’il […] n’ existe aucune autre solution valable […] » (Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition [LSCMLC] par. 34(1)). On s’attendait à ce que le nouveau régime permette d’éviter les longs séjours dans les unités d’intervention structurée et à ce que les détenus ne soient pas confinés dans leurs cellules 24 heures sur 24. Au lieu de cela, le projet de loi prévoyait qu’on leur offrirait au moins quatre heures par jour à l’extérieur de leurs cellules, dont deux heures étaient censées comporter un contact humain significatif.

À l’aide de données qui comprennent toutes les UIS qui restent jusqu’au 22 août 2021, le Comité a examiné le fonctionnement des UIS au cours de leurs 21 premiers mois de fonctionnement. Bien que beaucoup de choses puissent être examinées, nous nous sommes concentrés sur une question fondamentale, à savoir si les UIS fonctionnaient d’une manière conforme à certains aspects de la loi. Les observations aideront le Comité à déterminer les priorités de son travail. Comme on le verra, notre examen initial des données reçues du Service correctionnel du Canada (SCC) au début de septembre 2021 soulève des questions sur la mesure dans laquelle les attentes législatives ont été satisfaites.Note de bas de page2 

Le défi des unités d’intervention structurées

Le nombre de personnes dans les UIS est assez faible, constituant par exemple seulement 1,4 % de la population carcérale en détention au 22 août 2021. Cependant, une proportion beaucoup plus importante de la population carcérale – nous estimons qu’elle est d’environ 8,4 % – a été hébergée dans une UIS à un moment donné au cours de son séjour au pénitencier entre le 30 novembre 2019 et le 22 août 2021.

Faire en sorte que cette forme d’isolement la plus restrictive soit utilisée avec parcimonie et humanité, et faire en sorte que les Canadiens ne soient plus soumis à des conditions qui équivalent à de l’isolement cellulaire, est important non seulement pour les détenus, mais aussi pour le public canadien. On sait que l’isolement cellulaire est dangereux pour les gens qui en sont victimes.Note de bas de page3 Les unités d’intervention structurées et la mise en place d’un mécanisme de surveillance indépendant de celles-ci, constituent la solution retenue par le gouvernement fédéral pour contrer les effets nocifs de l’isolement cellulaire, lequel comprend: l’isolement pour une période longue et indéfinie et l’enfermement pour une période de plus de vingt heures. Étant donné que la plupart des détenus des pénitenciers canadiens finissent par être libérés dans la collectivité, tous les Canadiens ont un intérêt dans le fonctionnement des UIS.

Inégalité des répercussions des UIS sur les détenus : Autochtones

Comme c’est le cas pour de nombreux autres aspects de la vie canadienne, l’expérience dans l’une des formes d’emprisonnement les plus restrictives du Canada – l’UIS – n’est pas répartie également entre les groupes au Canada. Les peuples autochtones sont un groupe évident devant faire l’objet de préoccupations chez les Canadiens et qui doit être surveillé – et envers lequel le gouvernement du Canada a déjà exprimé ses préoccupations. Si les UIS sont possiblement préjudiciables, (si elles sont soumises au fonctionnement quasi similaire des précédentes unités de ségrégation) alors, compte tenu de l’historique du traitement des peuples autochtones par le Canada, nous devrions nous préoccuper particulièrement de la représentation des peuples autochtones (ainsi que d’autres groupes marginalisés ou vulnérables) au sein de ces unités.

Les peuples autochtones représentent environ 4,2 % de la population canadienne adulte, mais le 22 août 2021, ils représentaient environ 32 % de la population carcérale du SCC. À cette date, 48,9 % de la population des UIS était autochtone.

Autrement dit, l’incidence des UIS n’est pas la même au sein des groupes de personnes au Canada et est inégalement ressentie parmi les groupes pénitenciers. Les populations autochtones sont clairement surreprésentées dans les UIS.

Certaines exigences de base des UIS

A) Temps passé dans l’UIS. La LSCMLC stipule que « L’incarcération dans une unité d’intervention structurée prend fin le plus tôt possible » (art. 33 de la LSCMLC). Lorsqu’on considère les personnes qui ne reçoivent pas au moins deux heures de contact humain significatif chaque jour, l’Ensemble des règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus de 2015 (Règles Nelson Mandela) font la distinction entre celles qui sont confinées pendant 15 jours ou moins et celles qui sont confinées pendant 16 jours ou plus. Au cours de la période du 30 novembre 2019 au 22 août 2021, 54,8 % des séjours-personnesNote de bas de page4 dans les UIS étaient d’une durée de 16 jours ou plus (tableau 1 en annexe).

La LSCMLC ne donne pas de directives sur la signification des mots « L’incarcération dans une unité d’intervention structurée prend fin le plus tôt possible » (art. 33). On pourrait dire que « ce qui est possible » dépend, dans une large mesure, des efforts déployés par le SCC pour résoudre le problème qui a entraîné l’incarcération du détenu dans l’UIS. Nous avons constaté d’importants écarts entre les régions en ce qui concerne le temps passé par les personnes dans les UIS (tableau 2). Par exemple, dans la région de l’Ontario, 30,5 % des séjours-personnes étaient de 62 jours ou plus, alors qu’au Québec, « seulement » 16,8 % des séjours étaient aussi longs.

B) Obtenir 4 heures en dehors de la cellule d’UIS. Lorsqu’un détenu se trouve dans une UIS, « le Service accorde quotidiennement à tout détenu incarcéré dans une unité d’intervention structurée la possibilité : a) de passer au moins quatre heures en dehors de sa cellule; b) d’avoir, pour au moins deux heures, la possibilité d’interagir avec autrui… » (LSCMLC, paragraphe 36(1)). Le temps passé à l’extérieur de la cellule – et plus précisément, le temps passé hors de la cellule impliquant un « contact humain significatif » – est donc une exigence importante du nouveau système. Étant donné que les préoccupations et les normes internationales sont axées, à juste titre, sur les longs séjours dans les unités d’intervention structurée, notre rapport porte principalement sur les séjours de 16 jours ou plus. En examinant ce groupe, nous avons constaté que 78,4 % de ces personnes qui ont séjourné 16 jours ou plus ont manqué leurs quatre heures de sortie de la cellule au moins la moitié de leurs jours (tableau 3). Il y a eu quelques écarts dans le temps, mais même au cours de la dernière période de trois mois que nous avons examinée (ceux qui sont entrés dans l’UIS de mars à mai 2021), 68,9 % des détenus n’ont pas obtenu les quatre heures « promises » de sortie de cellule au moins la moitié du temps. Il ne s’agissait pas ici d’une perte de quelques minutes; pour la plupart, le temps passé hors de la cellule était beaucoup moindre que les quatre heures mentionnées dans la loi (tableau 5). En effet, 28,3 % n’ont reçu qu’une heure ou moins à l’extérieur de leur cellule.

D’après les discussions que nous avons eues avec le SCC et les détenus qui ont vécu dans des UIS, il arrive que les détenus refusent de quitter leur cellule d’UIS. À l’heure actuelle, nous n’avons pas suffisamment d’information sur les raisons de ces refus. Toutefois, si l’on ne tient compte que des détenus dans qui séjournent dans les UIS depuis 16 jours ou plus, nous constatons (tableau 6) que le SCC enregistre un nombre relativement faible (10,4 %) de détenus qui ont refusé de quitter leur cellule la plupart du temps. De plus, le taux de refus varie considérablement d’une région à l’autre. La proportion de ces détenus en détention de longue durée (ceux qui sont dans les UIS depuis 16 jours ou plus) qui ont refusé de quitter leur cellule la plupart du temps (plus de la moitié des jours) ou pendant plusieurs jours se chiffre à 0,5 % en Ontario, mais à 35 % dans la région du Pacifique (tableau 7). La question évidente qu’il faut se poser est simple : si les détenus de certaines régions (par exemple, l’Ontario et les Prairies) refusent relativement peu souvent de quitter leur cellule en tout temps, pourquoi les détenus dans les UIS de la région du Pacifique refusent-ils de le faire autant? C’est une question à laquelle le Comité espère pouvoir trouver une réponse.

C) Le fait de ne pas avoir passé quatre heures hors de la cellule de l’UIS est-il attribuable à des situations où « le détenu refuse de profiter des occasions de passer du temps à l’extérieur de sa cellule] » (LSCMLC, alinéa 37(1)a))? Comme nous l’avons déjà mentionné, les refus des détenus de quitter leur cellule sont loin d’être rares, mais sans preuve détaillée (indépendante) sur les raisons des refus, il est difficile d’évaluer ce que signifie « refus ». Si, par exemple, un détenu craint se faire blesser par d’autres détenus, cela pourrait être très préoccupant si le SCC ne lui fournit pas un environnement sécuritaire. Il se peut que les détenus ne soient pas à l’aise d’en parler à un employé du SCC. Le détenu pourrait également refuser parce que ce qu’on lui offre n’est pas attrayant (par exemple, temps passé dans la cour sans rien faire lors d’une journée très froide).

Nous nous sommes penchés sur la question de savoir si les « refus » par le détenu de quitter les cellules d’UIS expliquaient adéquatement le fait que de nombreuses personnes ne se prévalent pas de leurs quatre heures à l’extérieur de la cellule. La réponse simple à cette question est que les refus expliquent en partie l’échec à atteindre 4 heures hors de la cellule, mais en aucun cas expliquent-il la totalité de celui-ci.

En ce qui concerne les détenus faisant un long séjour seulement (ceux qui ont séjourné 16 jours ou plus dans l’UIS), nous avons constaté qu’il y avait 563 séjours-personnes (ou 33,8 % des 1 666 séjours-personnes de longue durée) dans lesquels les données du SCC (consignées en vertu du paragraphe 37(2) de la LSCMLC) montrent que le détenu n’a jamais refusé de quitter la cellule ou qu’il ne l’a refusé qu’une seule fois. Cependant, 360 de ces détenus (soit 63,9 % des 563) ont manqué leur temps de sortie alloué d’une durée de 4 heures au moins 20 % des jours. En fait, 134 de ces 563 détenus ont manqué leurs 4 heures de sortie de la cellule pendant au moins les trois quarts de leur séjour dans l’UIS. 

En examinant ces 1 666 séjours d’au moins 16 jours dans une UIS, nous avons calculé (voir le tableau 8) qu’il y a 1 222 personnes (ou 73 % si toutes les personnes avaient un long séjour dans une UIS) dont les « refus » n’expliquent pas adéquatement (ou n’abordent pas) l’incapacité du SCC de fournir le temps passé hors cellule prévu par la loi. 

D) La responsabilité du SCC selon laquelle il doit permettre aux détenus des UIS « d’avoir, pour au moins deux heures, la possibilité d’interagir avec autrui dans le cadre d’activités [diverses] : » (LSCMLC, alinéa 36(1)b)) et son rendement par rapport à celle-ci. La LSCMLC ordonne au SCC que « le Service offre à un détenu dans une unité d’intervention structurée » (alinéa 36(1)b)) la possibilité d’obtenir deux heures lors desquelles il établit ce qu’on a appelé un contact humain significatif. En bref, nos constatations sont très semblables à celles concernant l’obtention de 4 heures de sortie de la cellule d’UIS.

Si l’on ne tient compte que des « longs séjours » en UIS (ceux dont le séjour était de 16 jours ou plus), nous constatons, encore une fois, que de bon nombre de personnes n’obtiennent pas les deux heures promises par jour d’interaction significative avec les gens. Vingt-huit pour cent ont manqué leurs deux heures de contact humain significatif lors de plus de 75 % des jours pendant leur séjour dans l’UIS (tableau 9). 

Un certain nombre de détenus ont refusé de quitter leur cellule de l’UIS pour participer à ce que le SCC offrait comme « contact humain significatif » (voir le tableau 10). Tout particulièrement, nous avons constaté, encore une fois, que le fait qu’un détenu refuse de quitter sa cellule pour avoir des contacts humains réels n’explique pas entièrement le fait que les détenus n’obtiennent pas les contacts humains réels exigés au sens de l’alinéa 36(1)b) de la LSCMLC. (Tableau 11). Par exemple, 470 détenus n’ont jamais refusé ou refusé une seule fois de quitter leur cellule, toute la journée, pour avoir un contact humain significatif. Dans un total de 184 de ces 470 séjours-personnes (39 %), les propres données du SCC montrent que le détenu n’a pas eu les deux heures requises de contact humain significatif au cours d’au moins 20 % de ses jours dans l’UIS.

Santé mentale

Du point de vue de la santé mentale, l’une des théories à l’origine de l’élaboration de la loi qui a créé les UIS expliquait que les longues périodes d’isolement étaient particulièrement graves parce qu’on sait qu’elles exacerbent les problèmes de santé mentale (voir la note en bas de page 3 ci-dessus). En effet, la loi exige certaines évaluations de la santé mentale (par exemple, art. 37.1 de la LSCMLC). Nous savons que les problèmes de santé mentale sont une préoccupation, en particulier pour les détenus autochtones qui, lorsqu’ils sont placés dans des pénitenciers, sont susceptibles d’être séparés d’un bon nombre de leurs soutiens culturels.

En dépit des évaluations de santé mentale qui doivent avoir eu lieu, nous avons constaté (tableau 12) que les personnes ayant un besoin reconnu en santé mentale sont un peu plus susceptibles d’être détenues dans une UIS plus longtemps que celles qui n’ont pas de besoin identifié en santé mentale. L’examen de la période passée dans l’UIS pour ceux qui ont des besoins en santé mentale et ceux qui n’en ont pas ne devrait pas nous distraire du fait que 29 % des personnes qui restent dans l’unité d’intervention structurée ont des besoins en santé mentale au début de leur séjour dans l’unité. Mais nous avons aussi constaté que les détenus autochtones qui sont transférés dans des UIS sont beaucoup plus susceptibles que ceux qui ne sont pas désignés comme Autochtones d’avoir des besoins en santé mentale déterminés par le SCC (tableau 13).

Le SCC nous a également fourni un indicateur permettant de déterminer si des changements dans l’état de santé mentale avaient apparemment eu lieu dans l’UIS. On a souligné que le « changement » a des significations différentes selon l’endroit où le point de départ est déterminé (par exemple, « rester au même point » a un sens très différent si l’on n’a pas de problèmes de santé mentale que si l’on est aux prises avec des problèmes très graves). Nous étions surtout préoccupés par ceux dont l’état de santé mentale était, selon le SCC, en détérioration.

Les données du SCC montrent que les personnes dont l’état de santé mentale se détériorait pendant qu’elles étaient dans l’UIS étaient beaucoup plus susceptibles d’être détenues pendant une très longue période dans l’UIS. Par exemple, 74,6 % des personnes ayant divers problèmes de santé mentale dont l’état se détériore sont dans des unités d’intervention structurée depuis plus d’un mois. (Voir le tableau 14). Compte tenu de ce qu’on sait des effets de l’isolement dans les cellules de prison, il s’agit de conclusions très inquiétantes qui méritent clairement un examen supplémentaire.

Un aperçu des séjours dans les UIS : combinaison de la durée dans l’UIS et du temps passé à l’extérieur de la cellule.

En combinant les exigences législatives selon lesquelles les séjours dans les UIS devraient être, dans la mesure du possible, courts, et celles selon lesquelles les personnes devraient bénéficier d’une période raisonnable en dehors de leur cellule, nous constatons que certains détenus sont doublement désavantagés du fait qu’ils ont à la fois de longs séjours et des séjours au cours desquels ils sont en grande partie isolés du contact humain. 

Nous avons divisé les séjours à l’UIS d’une manière qui reflète, dans une large mesure, l’Ensemble des règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus. En bref, nous avons divisé les gens en trois groupes selon deux ensembles de critères.

a) Le premier groupe, qu’on pourrait appeler « un certain isolement », a passé 15 jours ou moins dans l’UIS. Les détenus de ce groupe ont obtenu en moyenne moins de deux heures de contact humain significatif et n’ont jamais reçu la totalité des quatre heures prescrites par la loi. Toutefois, leur séjour n’a pas dépassé 15 jours.
b) Le deuxième groupe avait la même expérience que le groupe a) ci-dessus, mais leur séjour était de 16 jours ou plus. Nous les appelons les détenus en « isolement prolongé » parce qu’ils n’ont pas réussi à passer le temps à l’extérieur des cellules (en général, mais aussi avec un contact humain significatif) et qu’ils ont été dans l’UIS pendant une période prolongée (16 jours ou plus).
c) Les autres sont les détenus de l’UIS qui s’en sont mieux tirés, c’est-à-dire qui ont parfois passé quatre heures hors de la cellule et qui ont eu en moyenne au moins deux heures de contact humain significatif.

Pendant toute la durée de vie des UIS, 28,1 % des séjours peuvent être considérés comme de courts séjours (moins de 15 jours) avec des degrés d’isolement non prévus par la loi (temps insuffisant passé hors cellule) – ce que nous avons appelé ici « un certain isolement ». Un autre 9,3 % des séjours peut être considéré comme un isolement prolongé en ce sens que le détenu n’a pas obtenu le temps de sortie de sa cellule et que le séjour a duré 16 jours ou plus. 

Il y a, encore une fois, d’importants écarts entre les régions pour cette mesure combinée (tableau 15); 18,7 % des séjours dans la région du Pacifique sont classés dans le groupe « isolement prolongé », comparativement à seulement 3,7 % des séjours admissibles comme tels dans la région de l’Ontario. La région apparemment la plus fonctionnelle (les Prairies) comptait encore 10 % des séjours se classant dans le groupe que nous avons appelé « un certain isolement » et 7,1 % des séjours se classant dans le groupe que nous avons appelé « un isolement prolongé ». Il est clair qu’il faut travailler davantage pour comprendre cet écart entre les régions du Canada.

Conclusion

Dans ce premier aperçu du fonctionnement des UIS, nous avons dégagé quatre constatations importantes.

a) L’UIS – la forme d’emprisonnement la plus restrictive permise par la LSCMLC – est vécue davantage par certains groupes (par exemple, les détenus autochtones) que d’autres, et elle est plus fréquente dans certaines régions.

b) Dans bien des cas, la durée des séjours dans les UIS est très longue, et la durée de séjour varie considérablement d’une région à l’autre. La loi exige que le séjour dans une UIS « prenne fin le plus tôt possible » (LSCMLC, art. 33). Il semble que la notion de « possible » varie d’une région à l’autre.

c) Les pratiques qui sont censées différencier les UIS de l’isolement préventif ou de l’isolement cellulaire ne sont pas appliquées. Nous parlons ici des quatre heures obligatoires à l’extérieur de l’UIS et des deux heures de contact humain significatif à l’extérieur de la cellule. De plus, les refus de la part des détenus de quitter leur cellule ne tiennent pas suffisamment compte du fait que les détenus n’ont pas obtenu le temps de sortir de leur cellule tel que décrit dans la législation.

d) Les données révèlent de très graves préoccupations au sujet de l’utilisation des UIS chez les détenus aux prises avec des problèmes de santé mentale, et en particulier chez ceux qui, selon le SCC, souffrent d’une détérioration de leur santé mentale.

En somme, les longs séjours dans les UIS sans temps passé en dehors de la cellule ou sans les effets amélioratifs des interactions humaines significatives prévus par la loi sont devenus une caractéristique troublante du traitement des détenus dans les pénitenciers au Canada.

Observations préliminaires sur l’exploitation des unités d’intervention structurée de Service correctionnel Canada

Annexe de donnéesNote de bas de page5

Contact avec l’UIS

 Le 22 août 2021, 174 détenus dans les pénitenciers du SCC se trouvaient dans une UIS. Cela représente 1,4 % de la population carcérale. Ce chiffre est utile parce qu’il donne un aperçu de la population des UIS par rapport à l’ensemble de la population carcérale.

Entre novembre 2019 et le 22 août 2021, un total de 1 732 personnes avait passé au moins un jour dans une UIS. Ainsi, 1 732 personnes différentes ont subi les répercussions des UIS du Canada.

La transformation de ce nombre en un taux (de personnes qui risquaient de passer du temps dans une UIS) est simple : nous n’avons besoin de connaître que le nombre de personnes dans les pénitenciers le 22 août 2021 (12 491) plus le nombre de personnes qui ont passé du temps au pénitencier pendant la période de l’UIS, mais qui avaient été libérées avant cette date.Note de bas de page6

Nous estimons que 20 687 personnes différentes étaient en détention à un moment donné depuis que les UIS ont commencé à fonctionner. Cela signifie que 8,4 % des détenus du SCC qui étaient en détention pendant un certain temps entre la fin de novembre 2019 et le 22 août 2021 ont passé un certain temps dans une UIS.

Surreprésentation autochtone

Pour comprendre l’expérience des Autochtones du Canada en matière de sanctions pénales, il suffit d’examiner quelques chiffres.

Autrement dit, l’incidence des UIS n’est pas la même pour tous les groupes de personnes au Canada. Les Autochtones sont considérablement surreprésentés dans les UIS.

Les données de ce rapport

Toutes les données du présent rapport proviennent du Service correctionnel du Canada. Dans la plupart des cas, les données décriront ce que nous appelons un « séjour-personne » dans une UIS. Une personne qui, depuis la fin novembre 2019, a été transférée à deux occasions distinctes à une UIS aura, par conséquent, chacun de ces sursis décrits (indépendamment) dans nos constatations.Note de bas de page8

Tableau 1 : Durée du séjour dans l’UIS pour les détenus transférés à l’UIS entre novembre 2019 et le 31 mai 2021.

Tableau 1 : Durée du séjour dans l’UIS pour les détenus transférés à l’UIS entre novembre 2019 et le 31 mai 2021.
Durée du séjour dans l’UIS Nombre de détenus Pourcentage de ces détenus
1 à 5 jours 664 21,1 %
6 à 15 jours 749 24,2 %
16 à 31 jours 489 15,8 %
32 à 61 jours 510 16,4 %
62 à 552 jours 699 22,5 %
Total 3 101 100 %

Dans le tableau 1, nous voyons que bon nombre des séjours-personnes dans l’UIS – 699 ou 22,5 % de tous les séjours dans l’UIS pendant cette période – ont duré plus de deux mois. 

Tableau 2 : Écart régional de la durée du séjour dans les UIS.

Tableau 2 : Écart régional de la durée du séjour dans les UIS.
Tableau 2 : Écart régional 
 Région de l’UIS Nombre total de jours dans l’UIS, y compris ceux qui sont encore en service Total
1 à 5 jours 6 à 15 jours 16 à 31 jours 32 à 61 jours 62 à 552 jours
Atlantique 53 98 55 66 103 375
14,1 % 26,1 % 14,7 % 17,6 % 27,5 % 100,0 %
Québec 371 289 133 125 186 1104
33,6 % 26,2 % 12,0 % 11,3 % 16,8 % 100,0 %
Ontario 49 65 35 65 94 308
15,9 % 21,1 % 11,4 % 21,1 % 30,5 % 100,0 %
Prairies 73 155 161 173 218 780
9,4 % 19,9 % 20,6 % 22,2 % 27,9 % 100,0 %
Pacifique 108 142 105 81 98 534
20,2 % 26,6 % 19,7 % 15,2 % 18,4 % 100,0 %
Total 654 749 489 510 699 3101
21,1 % 24,2 % 15,8 % 16,4 % 22,5 % 100,0 %

Dans le tableau 2, nous constatons qu’il y a des écarts importants entre les régions quant au temps passé dans les UIS. Il suffit de regarder le contraste entre les Prairies et la région du Pacifique dans la proportion des séjours de 15 jours ou moins. Dans la région du Pacifique, 46,8 % des séjours dans une UIS sont d’une durée de 15 jours ou moins, tandis que dans la région des Prairies, seulement 29,3 % sont d’une telle durée.

À l’autre extrémité de la distribution des séjours à l’UIS, nous constatons qu’en Ontario, 51,6 % des séjours à l’UIS étaient d’une durée d’au moins 32 jours, comparativement au Québec où « seulement » 28,1 % sont aussi longs.

Tableau 3 : Atteinte de l’objectif législatif de 4 heures hors cellule par jour pour ceux qui sont dans l’UIS depuis 16 jours ou plus (seulement).

Tableau 3 : Atteinte de l’objectif législatif de 4 heures hors cellule par jour pour ceux qui sont dans l’UIS depuis 16 jours ou plus (seulement).
  Fréquence Pourcentage valide Pourcentage cumulatif
zéro jour manqué (0 %) – les détenus sont sortis pendant 4 heures chaque jour dans l’UIS 73 4,4 4,4
Les détenus ont manqué jusqu’à 20 % de leurs journées 133 8,0 12,4
Les détenus ont manqué de 21 % à 50 % de leurs journées 154 9,2 21,6
Les détenus ont manqué de 51 % à 75 % de leurs journées 272 16,3 37,9
Les détenus ont manqué de 76 % à 99 % de leurs journées 746 44,8 82,7
Les détenus ont manqué de 100 % de leurs journées 288 17,3 100,0
Total 1666 100,0  

Nous constatons ici qu’au cours de la période sur laquelle nous nous sommes concentrés (les séjours dans les UIS entre novembre 2019 et mai 2021), il y a eu un nombre important (1 306 ou 78,4 %) de ces « longs séjours » (dans les UIS) où les détenus ont manqué leur sortie de 4 heures pendant au moins la moitié de leurs jours.

Tableau 4 : Changements au fil du temps dans l’atteinte de l’objectif législatif de 4 heures hors cellule par jour pour ceux qui sont dans l’UIS depuis 16 jours ou plus (seulement).

Tableau 4 : Changements au fil du temps dans l’atteinte de l’objectif législatif de 4 heures hors cellule par jour pour ceux qui sont dans l’UIS depuis 16 jours ou plus (seulement).
Tableau 4 : Pourcentage de jours où les 4 heures hors cellule n’ont pas été atteintes et durée
 Mois au cours duquel le séjour dans l’UIS de la personne a commencé Pourcentage de jours où les 4 heures hors cellule n’ont pas été atteintes Total
zéro jour manqué (0 %) – les détenus sont sortis pendant 4 heures chaque jour dans l’UIS Les détenus ont manqué jusqu’à 20 % de leurs journées Les détenus ont manqué de 21 % à 50 % de leurs journées Les détenus ont manqué de 51 % à 75 % de leurs journées Les détenus ont manqué de 76 % à 99 % de leurs journées Les détenus ont manqué de 100 % de leurs journées
De novembre 2019 à février 2020 18 32 26 66 207 38 387
4,7 % 8,3 % 6,7 % 17,1 % 53,5 % 9,8 % 100,0 %
De mars 2020 à mai 2020 14 23 19 35 110 60 261
5,4 % 8,8 % 7,3 % 13,4 % 42,1 % 23,0 % 100,0 %
De juin 2020 à août 2020 18 23 42 42 103 55 283
6,4 % 8,1 % 14,8 % 14,8 % 36,4 % 19,4 % 100,0 %
De septembre 2020 à novembre 2020 4 4 26 45 121 55 255
1,6 % 1,6 % 10,2 % 17,6 % 47,5 % 21,6 % 100,0 %
De décembre 2020 à février 2021 3 26 14 40 120 58 261
1,1 % 10,0 % 5,4 % 15,3 % 46,0 % 22,2 % 100,0 %
De mars 2021 à mai 2021 16 25 27 44 85 22 219
7,3 % 11,4 % 12,3 % 20,1 % 38,8 % 10,0 % 100,0 %
Total 73 133 154 272 746 288 1666
4,4 % 8,0 % 9,2 % 16,3 % 44,8 % 17,3 % 100,0 %

La capacité du SCC d’atteindre cet objectif législatif varie quelque peu au fil du temps (tableau 4). Pour des raisons que nous ne comprenons pas, toujours en ce qui concerne les détenus en UIS qui séjournent longtemps, la proportion de personnes qui ont manqué leurs quatre heures complètes en dehors de leur cellule pendant tous leurs jours a diminué considérablement au cours de la dernière période (de mars à mai 2021). Par exemple, de décembre 2020 à février 2021, 22,2 % ont manqué leurs quatre heures complètes de sortie de cellule chaque jour et, au cours de la période de mars à mai 2021, cela a diminué de plus de la moitié pour s’établir à 10 %. Nous constatons toutefois que pendant cette période, près de la moitié (38,8 % + 10,0 % = 48,8 %) des détenus ayant fait de longs séjours n’ont pas obtenu les quatre heures obligatoires à l’extérieur de leur cellule pendant au moins 76 % de leurs jours dans l’UIS.

Tableau 5 : Le nombre moyen d’heures reçues par les détenus qui ont manqué leurs quatre heures à l’extérieur de leur cellule au cours d’un ou de plusieurs jours (séjours de 16 jours ou plus seulement).

Tableau 5 : Le nombre moyen d’heures reçues par les détenus qui ont manqué leurs quatre heures à l’extérieur de leur cellule au cours d’un ou de plusieurs jours (séjours de 16 jours ou plus seulement).
Heures reçues Fréquence Pourcentage des 1666 détenus Pourcentage de ceux qui ont manqué certaines heures
De 0 à une demi-heure 217 13,0 13,6
Plus d’une demi-heure à 1 h 254 15,2 15,9
Plus de 1 h à 2 h 715 42,9 44,9
Plus de 2 h à 3 h 396 23,8 24,9
Plus de 3 h à 4 h 11 0,7 0,7
Total 1593 95,6 100,0
  Les détenus ont obtenu 100 % des jours avec 4 heures complètes 73 4,4  
Total 1666 100,0  

De toute évidence, le tableau 5 montre que, lorsque les détenus manquent leurs 4 heures à l’extérieur de leur cellule de l’UIS, il ne s’agit pas d’une situation où ils sont généralement simplement retournés à leur cellule quelques minutes plus tôt. Dans la plupart des cas, lorsqu’ils n’obtiennent pas leurs quatre heures complètes, ils n’obtiennent habituellement qu’une petite fraction du temps prescrit par la loi. 71,1 % ont reçu deux heures ou moins.

Tableau 6 : Refus de quitter la cellule toute la journée (pour les détenus dans l’UIS pendant 16 jours ou plus).

Tableau 6 : Refus de quitter la cellule toute la journée (pour les détenus dans l’UIS pendant 16 jours ou plus).
  Fréquence Pourcentage Pourcentage cumulatif
Aucun refus ou une seule fois 563 33,8 33,8
Refus au moins deux fois, représentant jusqu’à 20 % de leurs jours 578 34,7 68,5
Refus au moins deux fois, représentant jusqu’à 20,1 % à 50 % de leurs jours 351 21,1 89,6
Refus au moins deux fois, représentant jusqu’à 50,1 % à 100 % de leurs jours 174 10,4 100,0
Total 1666 100,0  

Il est clair que certains détenus (33,8 % + 34,7 % = 68,5 %) qui ont passé au moins 16 jours dans l’UIS n’ont jamais, selon les dossiers du SCC, refusé de quitter la cellule ou ont refusé peu fréquemment. Cependant, les autres (31,5 %) ont refusé de quitter leur cellule plus de 20 % de leurs jours.   

Tableau 7 : Écart d’une région à l’autre du taux de refus des détenus de quitter leur cellule toute la journée (pour ceux qui ont un long séjour – 16 jours ou plus – dans une UIS seulement).

Tableau 7 : Écart d’une région à l’autre du taux de refus des détenus de quitter leur cellule toute la journée (pour ceux qui ont un long séjour – 16 jours ou plus – dans une UIS seulement).
Région de l’UIS * Nombre de refus de quitter la cellule toute la journée – tableaux croisés
 Région de l’UIS Nombre de refus de quitter la cellule toute la journée Total
Aucun refus ou une seule fois Refus au moins deux fois, représentant jusqu’à 20 % de leurs jours Refus au moins deux fois, représentant jusqu’à 20,1 % à 50 % de leurs jours Refus au moins deux fois, représentant jusqu’à 50,1 % à 100 % de leurs jours
Atlantique 57 95 57 10 219
26,0 % 43,4 % 26,0 % 4,6 % 100,0 %
Québec 75 164 145 56 440
17,0 % 37,3 % 33,0 % 12,7 % 100,0 %
Ontario 83 98 9 1 191
43,5 % 51,3 % 4,7 % 0,5 % 100,0 %
Prairies 326 158 45 10 539
60,5 % 29,3 % 8,3 % 1,9 % 100,0 %
Pacifique 22 63 95 97 277
7,9 % 22,7 % 34,3 % 35,0 % 100,0 %
Total 563 578 351 174 1666
33,8 % 34,7 % 21,1 % 10,4 % 100,0 %

La proportion de ces détenus qui ont refusé de quitter leur cellule la plupart du temps (plus de la moitié) ou plusieurs jours varie considérablement d’une région à l’autre (de 0,5 % en Ontario à 35 % dans la région du Pacifique).  

Tableau 8 : Pour les personnes dont la durée du séjour à l’extérieur de la cellule d’UIS varie, les refus du détenu expliquent-ils le fait qu’il ne sort pas de sa cellule?

Tableau 8 : Pour les personnes dont la durée du séjour à l’extérieur de la cellule d’UIS varie, les refus du détenu expliquent-ils le fait qu’il ne sort pas de sa cellule?
Tableau 8 : Pourcentage de jours où 4 heures à l’extérieur de la cellule n’ont pas été effectuées en fonction du taux de refus
 Pourcentage de jours où les 4 heures hors cellule n’ont pas été atteintes Nombre de refus de quitter la cellule toute la journée Total
Aucun refus ou une seule fois Refus au moins deux fois, représentant jusqu’à 20 % de leurs jours Refus au moins deux fois, représentant jusqu’à 20,1 % à 50 % de leurs jours Refus au moins deux fois, représentant jusqu’à 50,1 % à 100 % de leurs jours
zéro jour manqué (0 %) – les détenus sont sortis pendant 4 heures chaque jour dans l’UIS 73 0 0 0 73
100,0 % 0,0 % 0,0 % 0,0 % 100,0 %
Les détenus ont manqué jusqu’à 20 % de leurs journées 130 3 0 0 133
97,7 % 2,3 % 0,0 % 0,0 % 100,0 %
Les détenus ont manqué de 21 % à 50 % de leurs journées 99 53 2 0 154
64,3 % 34,4 % 1,3 % 0,0 % 100,0 %
Les détenus ont manqué de 51 % à 75 % de leurs journées 127 136 9 0 272
46,7 % 50,0 % 3,3 % 0,0 % 100,0 %
Les détenus ont manqué de 76 % à 99 % de leurs journées 108 336 247 55 746
14,5 % 45,0 % 33,1 % 7,4 % 100,0 %
Les détenus ont manqué de 100 % de leurs journées 26 50 93 119 288
9,0 % 17,4 % 32,3 % 41,3 % 100,0 %
Total 563 578 351 174 1666
33,8 % 34,7 % 21,1 % 10,4 % 100,0 %

Le tableau 8 indique que les refus peuvent tenir compte de certaines des expériences enregistrées des détenus d’une UIS, mais certainement pas de toutes ces expériences.

Ce n’est pas un tableau simple à lire, mais les données montrent un rejet stupéfiant de la suggestion selon laquelle les gens ne reçoivent pas leur temps libre à l’extérieur de leur cellule parce qu’ils refusent de quitter leur cellule :

Tableau 9 : Pourcentage de jours où les deux heures de contact humain significatif n’ont pas été réalisées (longs séjours seulement)

Tableau 9 : Pourcentage de jours où les deux heures de contact humain significatif n’ont pas été réalisées (longs séjours seulement)
Durée pendant laquelle 2 heures à l’extérieur de la cellule aux fins d’interaction n’ont pas été réalisées Nombre de séjours-personnes de novembre 2019 au 31 mai 2021 Pourcentage de tous les séjours (16 jours ou plus)
Zéro jour manqué 122 7,3 %
Les détenus ont manqué jusqu’à 20 % de leurs journées 232 13,9 %
Les détenus ont manqué de 20,1 % à 50 % de leurs journées 451 27,1 %
Les détenus ont manqué de 50,1 % à 75 % de leurs journées 394 23,6 %
Les détenus ont manqué de 75,1 % à 99 % de leurs journées 409 24,5 %
Les détenus ont manqué de 100 % de leurs journées 58 3,5 %
Total 1666 100 %

Dans le tableau 9, en regardant de nouveau seulement les prisonniers ayant de « longs séjours » en UIS (ceux dont le séjour était de 16 jours ou plus), nous constatons, encore une fois, que bon nombre de personnes n’obtiennent pas les deux heures promises par jour d’interaction significative avec les gens. Vingt-huit pour cent (24,5 % + 3,5 %) ont manqué leurs deux heures de contact humain significatif dans plus de 75 % des jours pendant leur séjour dans l’UIS.

Tableau 10 : Refus de quitter la cellule pour un contact humain significatif (séjour prolongé dans l’UIS seulement).

Tableau 10 : Refus de quitter la cellule pour un contact humain significatif (séjour prolongé dans l’UIS seulement).
  Fréquence Pourcentage Pourcentage cumulatif
Aucun refus ou une seule fois 470 28,2 28,2
Refus au moins deux fois, représentant jusqu’à 20 % de leurs jours 605 36,3 64,5
Refus au moins deux fois, représentant jusqu’à 20,1 % à 50 % de leurs jours 406 24,4 88,9
Refus au moins deux fois, représentant jusqu’à 50,1 % à 100 % de leurs jours 185 11,1 100,0
Total 1666 100,0  

Encore une fois, un nombre important de détenus ont refusé de quitter leur cellule de l’UIS pour participer à ce que le SCC offrait comme « contact humain significatif » (voir le tableau 10).

Tableau 11 : Relation entre le fait de ne pas obtenir les deux heures de sortie de la cellule prévues par la loi et la décision des détenus de quitter leur cellule (séjours prolongés seulement).

Tableau 11 : Relation entre le fait de ne pas obtenir les deux heures de sortie de la cellule prévues par la loi et la décision des détenus de quitter leur cellule (séjours prolongés seulement).
Pourcentage de jours où 2 heures à l’extérieur de la cellule n’ont pas été effectuées en fonction du taux de refus
Pourcentage de jours où les 2 heures hors cellule n’ont pas été atteintes Nombre de refus de quitter la cellule pour un contact humain significatif toute la journée Total
Aucun refus ou une seule fois Refus au moins deux fois, représentant jusqu’à 20 % de leurs jours Refus au moins deux fois, représentant jusqu’à 20,1 % à 50 % de leurs jours Refus au moins deux fois, représentant jusqu’à 50,1 % à 100 % de leurs jours
zéro jour manqué (0 %) – les détenus sont sortis pendant 2 heures chaque jour dans l’UIS 122 0 0 0 122
100,0 % 0,0 % 0,0 % 0,0 % 100,0 %
Les détenus ont manqué jusqu’à 20 % de leurs journées 164 68 0 0 232
70,7 % 29,3 % 0,0 % 0,0 % 100,0 %
Les détenus ont manqué de 21 % à 50 % de leurs journées 116 303 32 0 451
25,7 % 67,2 % 7,1 % 0,0 % 100,0 %
Les détenus ont manqué de 51 % à 75 % de leurs journées 39 166 183 6 394
9,9 % 42,1 % 46,4 % 1,5 % 100,0 %
Les détenus ont manqué de 76 % à 99 % de leurs journées 25 65 183 136 409
6,1 % 15,9 % 44,7 % 33,3 % 100,0 %
Les détenus ont manqué de 100 % de leurs journées 4 3 8 43 58
6,9 % 5,2 % 13,8 % 74,1 % 100,0 %
Total 470 605 406 185 1666
28,2 % 36,3 % 24,4 % 11,1 % 100,0 %

Une fois de plus, nous constatons que, pour un nombre important de détenus d’UIS ayant fait un long séjour – 609 sur 1666, soit 36,6 % des longs séjours dans les UIS, les refus ne pouvaient pas expliquer tous les échecs du SCC à fournir l’élément le plus précieux de la vie en UIS : 2 heures d’« un contact humain significatif par la prestation de programmes, d’interventions, de services, d’activités culturelles, de pratiques religieuses et spirituelles, d’activités de loisirs, de contacts familiaux et communautaires » (Directive du commissaire 711, no 7).

Tableau 12 : Comparaison du temps passé dans l’UIS pour les personnes ayant ou non un besoin en santé mentale déterminé au début du séjour dans l’UIS (pour les personnes admises dans l’UIS jusqu’à la fin mai 2021).

Tableau 12 : Comparaison du temps passé dans l’UIS pour les personnes ayant ou non un besoin en santé mentale déterminé au début du séjour dans l’UIS (pour les personnes admises dans l’UIS jusqu’à la fin mai 2021).
Tableau 12 : Durée des séjours en UIS pour les personnes ayant des besoins en santé mentale et celles qui n’en ont pas
 Besoins en santé mentale Nombre total de jours dans l’UIS, y compris ceux qui sont encore en service Total
De 1 à 15 jours 16 jours ou plus
Non 1034 1162 2196
47,1 % 52,9 % 100,0 %
Oui 369 536 905
40,8 % 59,2 % 100,0 %
Total 1403 1698 3101
45,2 % 54,8 % 100,0 %

Nous voyons dans le tableau 12 que les personnes ayant un besoin reconnu en santé mentale sont un peu plus susceptibles d’être détenues dans une UIS plus longtemps que celles qui n’ont pas de besoin identifié en santé mentale. L’examen de la période passée dans l’UIS pour ceux qui ont des besoins en santé mentale et ceux qui n’en ont pas ne devrait pas nous distraire du fait que 29 % des séjours-personnes (905 divisé par 3101 = 0,29) dans l’UIS ont des besoins en santé mentale au début de leur séjour dans l’UIS.

Tableau 13 : Présence d’un besoin en santé mentale au début du séjour dans l’UIS selon le statut autochtone.

Tableau 13 : Présence d’un besoin en santé mentale au début du séjour dans l’UIS selon le statut autochtone.
Tableau 13 : Besoins en matière de santé mentale des détenus autochtones et non autochtones de l’UIS
  Besoins en santé mentale Total
Non Oui
Non-autochtones 1434 452 1886
76,0 % 24,0 % 100,0 %
Autochtones 762 453 1215
62,7 % 37,3 % 100,0 %
Total 2196 905 3101
70,8 % 29,2 % 100,0 %

Dans le tableau 13, nous constatons que les détenus autochtones qui sont transférés dans des UIS sont beaucoup plus susceptibles d’avoir des besoins en santé mentale déterminés que ceux qui ne sont pas identifiés comme Autochtones.

Tableau 14 : État de santé mentale et durée du séjour dans l’UIS

Tableau 14 : État de santé mentale et durée du séjour dans l’UIS
Tableau 14 : Groupes de santé mentale (selon les statuts de santé définis par le SCC) et nombre total de jours dans l’UIS (y compris ceux qui sont encore dans l’UIS le jour de la collecte des données)
 Groupes de la santé mentale (de l’état de santé des 9 groupes du SCC 
(catégories))
Nombre total de jours dans l’UIS, y compris ceux qui sont encore en service Total
1 à 5 jours 6 à 15 jours 16 à 31 jours 32 à 61 jours 62 à 552 jours
Aucun, faible ou certains besoins, ne s’aggravent pas [Grps1, 2, 3, 4] 591 652 403 396 570 2612
22,6 % 25,0 % 15,4 % 15,2 % 21,8 % 100,0 %
Besoins élevés, ne s’aggravent pas [Groupes 7,8] 54 80 59 36 51 280
19,3 % 28,6 % 21,1 % 12,9 % 18,2 % 100,0 %
Divers besoins en santé mentale et aggravation [Groupes 5, 6, 9] 9 17 27 78 78 209
4,3 % 8,1 % 12,9 % 37,3 % 37,3 % 100,0 %
Total   654 749 489 510 699 3101
  21,1 % 24,2 % 15,8 % 16,4 % 22,5 % 100,0 %

Dans le tableau 14, nous pouvons voir que les personnes dont l’état de santé mentale se détériorait pendant qu’elles étaient dans l’UIS étaient beaucoup plus susceptibles d’être détenues pendant une très longue période dans l’UIS. Par exemple, 74,6 % des personnes ayant divers problèmes de santé mentale sont dans des UIS depuis plus d’un mois. Cela contraste avec les deux autres groupes (aucun, faible ou certains besoins/ne s’aggravent pas; besoins élevés/ne s’aggravent pas) où 37 % et 31,1 % (respectivement) sont restés plus d’un mois.

Tableau 15 : Isolement et isolement prolongé dans les régions.

Tableau 15 : Isolement et isolement prolongé dans les régions.
Tableau 15 : Isolement et isolement prolongé par région
 Région de l’UIS Groupes Total
Un certain isolement : En moyenne, 2 heures ou moins; le détenu est resté jusqu’à 15 jours (a manqué 100 % des jours, obtenant 4 heures) Isolement prolongé (même chose, mais plus de 16 jours) Tous les autres
Atlantique 105 33 236 374
28,1 % 8,8 % 63,1 % 100,0 %
Québec 445 88 563 1096
40,6 % 8,0 % 51,4 % 100,0 %
Ontario 71 11 218 300
23,7 % 3,7 % 72,7 % 100,0 %
Prairies 78 55 645 778
10,0 % 7,1 % 82,9 % 100,0 %
Pacifique 168 100 266 534
31,5 % 18,7 % 49,8 % 100,0 %
Total 867 287 1928 3082
28,1 % 9,3 % 62,6 % 100,0 %

Nous avons divisé le régime de pensions d’invalidité d’une manière qui reflète, dans une large mesure, l’Ensemble de règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus. 

En bref, nous avons divisé les gens en trois groupes selon deux ensembles de critères.

a) Le premier groupe, qu’on pourrait appeler « un certain isolement », a passé 15 jours ou moins dans l’UIS. Les détenus de ce groupe ont obtenu en moyenne moins de deux heures de contact humain significatif et n’ont jamais reçu la totalité des quatre heures prescrites par la loi. Toutefois, leur séjour n’a pas dépassé 15 jours.

b) Le deuxième groupe avait la même expérience que le groupe a) ci-dessus, mais leur séjour était de 16 jours ou plus. Nous les appelons les détenus en « isolement prolongé » parce qu’ils n’ont pas réussi à passer le temps à l’extérieur des cellules (en général, mais aussi avec un contact humain significatif) et qu’ils ont été dans l’UIS pendant une période prolongée (16 jours ou plus).

c) Les autres sont les détenus de l’UIS qui s’en sont mieux tirés, c’est-à-dire qui ont parfois passé quatre heures en cellule et qui ont eu en moyenne au moins deux heures de contact humain significatif.

Pendant toute la durée de vie des UIS, 28,1 % des séjours peuvent être considérés comme de courts séjours (moins de 15 jours) avec des degrés d’isolement non prévus par la loi (temps insuffisant passé hors cellule) – ce que nous avons appelé ici « un certain isolement ». Un autre 9,3 % des séjours peut être considéré comme un isolement prolongé en ce sens que le détenu n’a pas obtenu le temps requis à l’extérieur de sa cellule et que le séjour a duré 16 jours ou plus – ce que nous avons appelé un « isolement prolongé ». 

Comme pour presque toutes les mesures que nous avons examinées au sujet du fonctionnement des UIS, la probabilité qu’un détenu transféré dans une UIS subisse un « isolement » et un « isolement prolongé » variait considérablement d’une région à l’autre. « L’isolement » et « l’isolement prolongé » sont beaucoup plus susceptibles de se produire dans les séjours-personnes dans la région du Pacifique qu’en Ontario. De plus, la proportion de personnes au Québec qui ont vécu ce que nous appelons un « certain isolement » est beaucoup plus élevée que la proportion de séjours-personnes dans les Prairies ayant vécu la même chose.

Notes de bas de page

Note de bas de page 1

Ce Comité a été établi en juillet 2021 par le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile « pour surveiller, évaluer et établir des rapports sur les questions liées à la mise en œuvre continue des unités d’intervention structurée » https://www.securitepublique.gc.ca/cnt/cntrng-crm/crrctns/siuiap-ccuis-fr.aspx (téléchargé le 3 octobre 2021)

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Note de bas de page 2

Les détails de nos constatations, habituellement dans les tableaux, se trouvent dans l’« annexe sur les données » du présent rapport.

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Note de bas de page 3

Comme l’a écrit le professeur Craig Haney, professeur distingué de psychologie à l’Université de Californie à Santa Cruz, dans la revue spécialisée en criminologie, [traduction] « les résultats de recherche sur les effets psychologiques de l’isolement cellulaire sont étonnamment cohérents depuis le début du XIXe siècle. Des études ont permis de cerner un large éventail de réactions psychologiques indésirables qui se produisent fréquemment et qui touchent habituellement les détenus dans des unités d’isolement. La prévalence de la détresse psychologique est extrêmement élevée » (p. 365). « De nombreux examens de la documentation ont permis de constater que des scientifiques de diverses disciplines, travaillant de façon autonome et sur plusieurs continents, et au cours de nombreuses décennies, ont tiré des conclusions presque identiques sur les effets négatifs de l’isolement en général et de l’isolement cellulaire en particulier [références omises]. Ces résultats solides sont également cohérents sur le plan théorique. C’est-à-dire qu’ils sont cohérents avec une documentation de plus en plus abondante sur l’importance d’un contact social significatif pour le maintien de la santé mentale et physique. Haney, Craig : « The Psychological Effects of Solitary Confinement: A Systematic Critique ». Crime and Justice : A Review of Research (Michael Tonry, rédacteur en chef).  Volume 47. The University of Chicago Press, 2018.

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Note de bas de page 4

Certains détenus ont subi plus d’un séjour discret dans une cellule d’UIS au cours de la période pour laquelle nous avons des données (du 30 novembre 2019 au 22 août 2021). Chaque « séjour » est, à cette fin, traité comme un séjour indépendant même si certaines personnes peuvent représenter plus d’un « séjour-personne ». 

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Note de bas de page 5

Ces constatations sont fondées sur les données reçues du SCC en septembre 2021. Ces données fournissent une image plus à jour des UIS qu’il n’a été possible de le faire à partir de quatre rapports antérieurs (publiés entre octobre 2020 et mai 2021) par Jane B. Sprott et Anthony Doob (avec Adelina Iftene pour le quatrième rapport). Les deux premiers rapports étaient fondés sur moins d’une année de données, et les deux derniers rapports ont utilisé des données sur les séjours en personne qui ont commencé seulement au cours des 12 premiers mois des UIS. Ces rapports antérieurs sont disponibles à l’adresse suivante : https://www.crimsl.utoronto.ca/news/reports-canada%E2%80%99s-structured-intervention-units (en anglais seulement).

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Note de bas de page 6

Pour estimer ce nombre, nous avons utilisé le nombre d’admissions découlant de la délivrance d’un mandat de dépôt (tiré du numéro de 2019 de l’Aperçu statistique : Le système correctionnel et la mise en liberté sous condition) comme estimation du flux annuel (puisque la taille de la population carcérale a été assez stable au cours des dernières années). Le flux au cours de la « période de l’UIS » a duré près de 21 mois. Par conséquent, nous avons multiplié le nombre d’admissions découlant de la délivrance d’un mandat de dépôt (4 749) par 1,726 pour estimer le nombre de personnes qui sont entrées dans les établissements du SCC et qui en sont sorties. On estime donc que les 1 732 personnes qui ont vécu dans une UIS pendant cette période représentent environ 8,4 % du nombre de personnes qui ont passé un certain temps dans une UIS dans un établissement de détention du SCC.

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Note de bas de page 7

Nous parlons des personnes âgées de plus de 18 ans parce que seuls les adultes peuvent être condamnés à une peine d’emprisonnement fédérale.

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Note de bas de page 8

Nos données ont une date de fin du 22 août 2021. Par conséquent, il n’y a pas de façon simple de décrire la durée du séjour (ou d’autres expériences) pour ceux qui sont entrés un peu avant cette date puisque nous ne connaissons pas leur durée réelle de séjour. Pour cette raison, bon nombre de nos analyses portent sur les personnes qui sont entrées dans l’UIS jusqu’à la fin de mai 2021 seulement. De cette façon, un prisonnier toujours dans l’UIS à cette date sera clairement classé comme un prisonnier « de longue durée » (puisqu’il aurait été dans l’UIS pendant plus de deux mois). Nous croyons que cette méthode fournit une description raisonnable de ce qui se passe dans le système tel qu’il fonctionne actuellement. 

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